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Cuba : Frente Frio !

Yaga

Partis le 17 janvier de Saint-Martin, nous approchons de Santiago de Cuba le soir du 23 janvier. Il nous reste une bonne trentaine de miles à parcourir, cap plein Nord, Damien est de quart, Yaga avance lestement, au travers – bon plein 1. Damien aperçoit une masse de nuages au Nord ; je sors la tête pour prendre mon quart juste au moment où Yaga pénètre sous ce couvercle noir et menaçant. Damien m'accueille joyeusement : "je crois qu'on vient de passer les portes de l'enfer."

Effectivement, des trombes d'eau nous tombent sur la tête, la température chute vertigineusement, et le vent passe plein Nord. Au lieu de faire route directement sur la baie de Santiago, nous voilà contraints à tirer des bords (horreur).

Deuxième ris pris, foc 2 affalé et remplacé par la trinquette 2 , troisième ris pris, le vent continue à monter. Zut, nous n'avons plus qu'une seule carte dans notre jeu, le tourmentin 2 ! On ne va quand même pas être obligés de se mettre à la cape, à se faire rincer et secouer, alors qu'il nous reste moins de vingt miles à parcourir (en route directe).

Heureusement, l'île nous protège de la houle, nous ne subissons que le clapot, c'est déjà bien assez désagréable ; toutes les trois à quatre minutes, un paquet de mer s'abat sur le bateau, trempant copieusement celui qui est de quart 3. Celui qui se "repose", cramponné sur sa couchette humide et inclinée à 30°, sursaute à chacun des chocs sur la coque, et pense très fort à l'architecte et au chantier navals, espérant qu'ils aient pris de bonnes marges de sécurité dans la conception du bateau. La mer se couvre de longues traînées d'écume, l'anémomètre affiche 37 nœuds de vent apparent.

On pourrait croire que Cuba ne veut pas de nous...Yaga grignote tout de même les miles, même so mes bords sont un peu carrés. Il nous faudra la nuit entière pour arriver à l'entrée de la baie de Santiago.

Voiles affalées, nous embouquons l'étroit chenal au moteur avec un sentiment certain de victoire. La baie de Santiago, d'une profondeur inouïe et parsemée de petites îles, est un véritable havre. La première personne à monter à bord, pour la Santé, nous demande naïvement si nous étions en train de faire le ménage : le plancher est inondé d'eau de mer, tout est trempé !

C'était là notre premier contact avec les fameux "fronts froids" cubains, qui en hiver s'insinuent entre deux anticyclones, et occasionnent des coups de vent du Nord. Durant tout le séjour cubain, nous en aurons eu environ un par semaine. Un équipage canadien, rencontré à Cienfuegos et arrivant de la côte Nord, qui reçoit de plein fouet ces fronts froids, ne gardait pas un souvenir charmé de sa croisière...

On l'aura méritée, cette île !

1 "au travers", le vent forme un angle de 90° par rapport à l'axe du bateau, "au bon plein", cet angle est de 60°.

2 trois de nos voiles d'avant, par ordre décroissant de taille (foc 30m2, trinquette 15m 2 , tourmentin 7m 2 ).Plus le vent forcit, plus il couche le bateau au lieu de le faire avancer, on remplace les voiles par de plus petites. Quand on n'a plus de voile plus petite, on ne peut plus avancer...

3 "de quart" = de garde, expression probablement inspirée de la marine militaire, voyez Wikipedia ou le Robert.

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