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Air New Zealand One ? Ici Minerva Reef !

Yaga

Nous sommes partis le 8 novembre des Fidji, sous l'œil attentif de deux douanières, venues pour vérifier que nous quittions bien le quai aussitôt les formalités de sortie terminées. Et nous sommes arrivés le 25 novembre, en milieu de journée, en Nouvelle-Zélande. Soit dix-sept jours et demi pour parcourir les mille deux cents miles séparant Savu Savu, aux Fidji, d'Opua, sur l'île Nord de la Nouvelle-Zélande. Faites le calcul de notre vitesse moyenne, c'est misérable. Nous mettrions-nous à battre des records de lenteur ? Aurions-nous troqué notre Grand Soleil contre un Bavaria ? Nenni, simplement, le 12 novembre, la météo reçue à bord grâce au téléphone satellite nous annonçait qu'une vilaine dépression arriverait en Nouvelle-Zélande en même temps que nous : vents de 40 nœuds et vagues de cinq à six mètres à prévoir...N'écoutant que notre courage qui ne nous disait rien (comme disait Desproges) et nous penchant sur la carte, nous décidâmes d'aller passer le temps à Minerva Reef en attendant que les choses se calment par là-bas en bas. Ca représente un détour de 500 miles, qui plus est au près, autant dire rien du tout...

Tangaroa, un bateau-copain, au milieu de nulle part...

Nous avons finalement passé cinq jours à Minerva Reef. Qu'est-ce donc que cet endroit dont personne (nous les premiers) n'a jamais entendu parler ? Faites un petit tour sur Google Earth pour commencer (23°37' S, 179°55' W). Vous avez l'impression qu'il s'agit d'un atoll ? Même pas ! En réalité, ce n'est qu'un récif, émergé à marée basse, submergé et quasi-invisible à marée haute (nombreuses épaves, remontant à avant l'invention du GPS...). Une fois dans le lagon, impression irréelle d'être arrêtés en plein océan. Les marches sur le platier, à marée basse, sont une expérience étonnante, seule dépasse une étroite bande de corail brun orangé, et le ciel et la mer envahissent tout l'horizon. Plus de vingt bateaux y étaient mouillés cette semaine-là, en attente comme nous d'une météo favorable pour aller en Nouvelle-Zélande ; tous des grands voyageurs, partis pour plusieurs années. Les annexes sillonnaient le lagon, ça papotait sec à la VHF*: un vrai village ! On les connaissait déjà presque tous, rencontrés en Polynésie, aux Tonga ou aux Fidji. Lorsque nous sommes arrivés, tout le monde ne parlait que des langoustes énormes qu'il suffisait de cueillir sur le platier la nuit à marée basse. Pas plus difficile que de ramasser des chanterelles ! Nous y sommes allés deux jours plus tard. La lune pleine – la plus grosse lune du siècle ! - était cachée dans les nuages. A la lueur des frontales, les petits buissons de corail brillaient de toutes leurs couleurs, bleu, violet, vert, rose... Des gros poissons-perroquets semblant flotter dans l'air tant l'eau était transparente, nageaient dans les failles s'insinuant au coeur du platier. Curieux, un petit requin pointe blanche est venu tourner dans le faisceau de nos frontales. Et, cerise sur le gâteau, la récolte de langoustes et de cigales de mer fut mémorable (on a fait bien attention à relâcher toutes celles portant des oeufs, pensons aux navigateurs de l'an prochain...). Tout comme le barbecue du lendemain, à bord de Reggae, un bateau de Rochelais. En revanche, les chasseurs sous-marins ont dû remiser leurs fusils-harpons : dans les dix secondes suivant la capture d'un poisson, le percepteur des impôts locaux venait prélever la taxe minervienne (100% du poisson pêché). Zéro évasion fiscale avec ce percepteur d'un genre particulier : il s'agissait d'un beau requin-tigre ! La veille de notre départ, un avion Search And Rescue néo-zélandais, ceux qui nous repèrent en mer si on lance un appel de détresse, a survolé le récif, comptant ses brebis afin de pouvoir vérifier que toutes arriveraient au bercail saines et sauves dans les jours suivants. Ce fut un déchaînement à la radio : " Vous nous enverrez les photos ," disait Aislado, voilier Kiwi. Tandis que le skipper d'un voilier australien se lançait dans un discours incompréhensible (un australien, quoi), interrompu par l'opératrice radio de l'avion, un peu perdue : "Pouvez-vous me donner votre indicatif d'appel , - Oh, j'en ai pas ! Mais je voulais juste dire, welcome to Minerva Reef !". Anarchiste. Des vrais gosses ! Nous étions quand même bien contents de voir cet avion : les Néo-Zed pensent à nous ! Finalement, nous avons eu de la chance avec la météo, une magnifique fenêtre s'est ouverte, et nous avons pu aller jusqu'à Opua, Baie des Iles, Nouvelle-Zélande sans ramasser de dépression, ni mettre le moteur ; même si quelques social-traîtres ont fait tourner leur bouzin pas moins de trente heures ! A bord de Yaga, quand le vent est tombé, on a regardé défiler les méduses et le plancton le long du bord ; on a fait cuire des crêpes ; on a observé le changement de couleur de l'eau, du bleu saphir des Tropiques au bleu sombre des eaux plus froides. Et le vent est revenu... * VHF pour Very High Frequency, radio à ondes courtes présente à bord de tous les bateaux naviguant au large.

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